Témoignage d'Ernest Gaither,
condamné à mort |
Quand vous lirez ceci, je serai
mort. Nous sommes le 9 septembre, un mardi, à minuit. Je suis condamné à mort
comme criminel. Depuis que je suis dans ma cellule, j’ai eu le temps de
beaucoup penser. Quelques-unes de mes pensées - un avertissement aux
criminels - furent publiées aujourd’hui dans le journal de Chicago (Chicago
Tribune) dans un article adressé aux "plus durs des endurcis"... |
J'ai 23 ans seulement, mais je
suis prêt à mourir. Savez-vous pourquoi? Parce que je suis prêt à rencontrer
Dieu et j’en suis heureux. Cette semaine, j’ai fait un rêve que j’emporterai
avec moi à la chaise électrique. J’étais sur le chemin du ciel, Jésus
marchait avec moi, mais je faisais quatre pas tandis qu’il en faisait deux.
Il me demanda pourquoi j’allais si vite et je Lui répondis que j’étais pressé
d’arriver à la maison. Puis là-haut, je fus tout environné d’anges.
Quelques-uns penseront que c’est bien étrange pour un homme qui est entré
athée à la prison, mais c’est exactement ce qui s’est passé, et vous
comprendrez mieux quand je vous aurai dit comment j’ai rencontré Dieu, un
matin de bonne heure. |
Tout d’abord, jetez un regard
sur mon passé. Il y a sept ans, j’étais un type qui se faisait valoir, chef
de mon propre "gang" des "plus durs des endurcis"... Nous
étions huit. L’un était EarI Parks surnommé "Risette", car il vous
aurait tué le sourire aux lèvres. Un autre était Charles Jones, connu sous le
nom de "Beau gosse", car il avait l’allure d’un joli garçon. Les
autres étaient: Herbert Liggins, connu sous le nom de "Patte
folle", car il traînait une jambe, William Lee était appelé "BilI
le Sauvage", et Charles Hill s’appelait "Colorado Kid"; Clyde
Bradford, lui, était si noir que nous l’appelions "Tout bleu". Le "timonier"
était Percy Beilmar. Nous l’avions surnommé ainsi parce qu’il était bon
chauffeur; mon timonier numéro 1. Tous sont en prison sauf Parks qui a été
exécuté. Ils m’appelaient "Nénesse, le Gaspilleur et le Coureur de
femmes". J’essayais d’agir comme un "caid", sortant toujours
de ma poche une "brique", quelquefois deux ou trois. |
Quand j’ai commencé à faire
tous ces tours, j’étais encore un gosse. Ma famille cherchait à m’envoyer à
l’école du dimanche et à l’église. Plus d’une fois, ils m’ont donné de
l’argent pour que j’y accompagne mes jeunes soeurs, mais je n’y suis jamais
allé. Je faisais promettre à celles-ci de ne rien dire, et pendant ce temps
je courais au cinéma. ,Je disais à mes parents que j’étais allé à l’église,
et ils ne s’apercevaient de rien. Le crime était en moi, et les films que je
voyais m’aidaient à concrétiser mes idées. J’y apprenais quelques trucs qui
m’instruisaient sur la "façon de s’y prendre". Je me souviens du
jour où J’ai vu le film "J’ai volé un million". J’étais là,
désirant être le gars qui possédait le million. |
Puis j’ai décidé d’apprendre
la boxe, pensant que j’étais "costaud" et qu’ainsi je pourrais me
défendre à l’occasion. Je pensais aussi que ça pourrait cogner dur un jour.
Je fus le meilleur de ma classe pendant un moment, puis devins "pro"
et combattis comme poids moyen pendant cinq ans. Je terminai comme poids
mi-lourd; le seul homme à me mettre k.o. fut Jimmy Bovins. A 18 ans, je me
trouvais dans une maison de correction dans l’état de l’illinois, pour vol à
main armée. En octobre, huit d’entre nous s’échappèrent, mais le mois suivant
je me retrouvais au pénitencier "Joliet". J’avais été capturé pour
meurtre dans un parc de Chicago, mais fus libéré sur parole en juin. lI
semblait que cela dût être une leçon pour moi, mais il n’en fut rien. |
Six mois plus jard, j’étais
chef d’un nouveau "gang"; cela dura jusqu’au 9 février dernier. Ce
soir-là, trois d’entre nous attaquèrent Max Barren, 49 ans, dans son bar
situé à l’ouest de Chicago. Barren essaya de saisir un pistolet; je bondis
sur lui, mais il était décidé à tirer. Je compris aussitôt que ce serait lui
ou nous, alors je tirai à bout portant et le tuai. Nous déguerpîmes avec
l’argent, 300 Dollars en tout, que je donnai plus tard aux autres gars. Je
m’enfuis à NewYork, puis à Atlanta, où la police m’arrêta. Quelques semaines
plus tard je comparus devant la cour de Chicago. |
"Reconnu coupable",
ainsi retentit le verdict. "Vous êtes condamné à mort ..." dit le
juge sévèrement. Ainsi j’entrai à Death Row, le "sentier de la
mort". Il n’y avait pas très longtemps que j’étais derrière les
barreaux, le 23 mars dernier, quand une femme de ma race - Mme Flora Jones,
de l’Eglise Baptiste d’Olivet - vint m’inviter à assister au service
religieux pour les détenus. J’étais en train de jouer aux cartes avec
d’autres copains et lui ris au nez. "Pourquoi faire?" lui dis-je,
"je ne pense même pas qu’il y ait un Dieu"; mais tandis que je
jouais, la femme insistait. Je me sentais si pécheur, qu’en réalité je ne
voulais rien savoir de Dieu, ni même s’Il existait. Ainsi, J’ignorai cette
femme. Tout-à-coup, ce qu’elle dit attira mon attention. "Si vous ne
croyez pas en Dieu", cria-t-elle de l’autre côté des barreaux,
"essayez seulement cette petite expérience: ce soir, avant de vous endormir,
demandez-Lui de vous réveiller à une certaine heure; puis demandez-Lui de
vous pardonner vos péchés." |
Elle avait une telle foi que
j’en fus saisi. Je n’ai pas assisté au service ce soir-là, mais je décidai de
faire l’expérience. Allongé sur ma paillasse, je murmurai: "Mon Dieu, si
Tu existes, réveille-moi à 2 heures 45." Dehors, c’était l’hiver, et les
fenêtres se givraient à l’intérieur. Pendant les premières heures de la nuit,
je dormis profondément, puis mon sommeil devint plus léger; finalement, je
m’éveillai complètement. J’avais chaud et transpirais quoique la cellule fût
froide. Tout était calme, sauf le bruit régulier de la respiration de
quelques détenus et le ronflement d’un voisin. J’entendis des pas au dehors;
c’était un gardien qui faisait sa tournée réglementaire. Quand Il passa, Je
l’arrêtai et lui demandai l’heure. Il regarda sa montre et dit: "Trois
heures moins le quart." "C’est la même chose que 2 heures 45,
dites-voir?" |
Tandis que je posais cette
question, mon coeur se mit soudain à battre violemment dans ma poitrine. Le
gardien grogna et s’éloigna; il ne me vit pas glisser au pied de ma paillasse
et tomber à genoux. Je ne me souviens pas de ce que je dis à Dieu, mais je
sais que je Lui demandai d’avoir pitié de moi, un assassin et un pécheur. Il
m’a sauvé cette nuit-là, je le sais, et depuis, j’ai toujours cru en Son Fils
Jésus. J’avais promis une "rossée" à un autre détenu pour le jour
suivant. Le matin, quand j’allai vers lui, il recula et me dit: "Je n’ai
pas envie de lutter avec toi, car tu t’y connais dans la boxe." -
"Je ne veux pas boxer", lui dis-je, "je viens seulement pour
te voir." Plusieurs s’étaient réunis pour nous voir lutter, mais ils
furent désappointés. Dieu m’avait délivré de mon péché et je n’avais plus
aucune envie de me battre. Plus tard, le bruit courut que je méditais quelque
tour pour éviter d’aller à la chaise électrique. |
Mon cas passa devant la Cour
suprême de l’illinois qui maintint la sentence de mort. Cela me "fit un
coup", mais je ne perdis pas la foi en Dieu. - Je sais maintenant qu’Il
ira avec moi; ainsi, vous voyez, je n’ai vraiment pas peur. Avant de mourir,
je veux laisser un message pour les autres jeunes: |
Commencez à servir le Seigneur
pendant que vous êtes jeunes, avancez sur ce chemin, et Il vous gardera dans
la droite ligne. Quand on commence à tuer, on est vaincu et li est difficile
d’en sortir. C’est exactement comme pour l’habitude de fumer ou de boire, on
en est esclave, on ne peut pas s’arrêter. Oui, je serai mort quand vous lirez
ceci, mais écoutez mon conseil: "... le salaire du péché, c’est la mort;
mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle en Jésus-Christ notre
Seigneur", dit la Bible. J’ai découvert que c’était vrai. |
Aujourd’hui 22 octobre, le
directeur Frank Sain m’a dit que le gouverneur Green m’accordait un délai
d’exécution jusqu’au 24 octobre. Je suis toujours heureux et ne crains rien.
Je mourrai demain, à minuit. |
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Ernest Gaither |
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Peter Tanis, missionnaire des
prisons a accompagné Ernest Gaither à la chaise électrique. Voici la
description des derniers moments du détenu: J’ai été autorisé à entrer dans
la cellule d’Ernest à peu près une heure avant minuit. L’atmosphère était
lourde, les gardiens se tenaient autour de la cellule, bavardant pour
détourner sa pensée "du voyage de minuit". Mais leur conversation
était forcée, et ce qu’ils disaient n’avait aucun sens. Lorsque je suis entré
dans sa cellule, Emest sourit et me salua. Un aumônier noir était en train de
lire la Bible avec lui. Il me donna le Saint Livre et me demanda de lire.
Ernest se pencha en avant et écouta attentivement tandis que je lisais:
"Car Christ est ma vie, et la mort m’est un gain... je suis pressé des
deux côtés: j’ai le désir de m’en aller et d’être avec Christ, ce qui de
beaucoup est le meilleur" |
Il reçut un grand réconfort de
ce verset: "Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort, je ne
crains aucun mal, car Tu es avec moi". Quand l’horloge sonna la dernière
heure de sa vie, il cita ce verset par coeur. Dehors, les gardiens écoutaient
sans rien dire, certains avaient les larmes aux yeux. A 11 heures et demie
environ, nous eûmes une réunion pendant laquelle nous chantâmes des
cantiques. Ernest voulut chanter: "Quand l’appel de Dieu retentira, je
serai là." Tandis que les derniers sons d’un autre cantique
"Quelques mots avec Jésus" se faisaient entendre, les gardiens
vinrent avec une tondeuse pour couper les cheveux de l’homme à la voix de
ténor. Juste avant minuit, Ernest pria: "Seigneur", dit-il à voix
basse, "quand je suis entré ici, je haïssais ces gardiens; mais
maintenant, je les aime, Seigneur. O Dieu, j’aime tous les hommes." Puis
il pria pour ceux auxquels il avait fait de la peine, pour sa mère, demandant
au Seigneur de la bénir; et Il conclut en disant: "Je ne vais pas mourir
par électrocution, je vais seulement m’assoir sur la chaise et
m’endormir." |
Quelques minutes plus tard,
une cagoule noire fut posée sur sa tète, et il commença à parcourir les
derniers mètres. De chaque côté de la chaise se tenaient des gardiens qui
paraissaient visiblement nerveux. Ernest le sentit et leur dit:
"Pourquoi tremblez-vous ainsi? Je n’ai pas peur." Soixante-quinze
témoins étaient présents quand le condamné fut attaché par des mains fébriles
sur la grande chaise noire que faisait ressortir un plancher d’acier sans
tâche. A minuit et trois minutes, le premier des trois chocs électriques
passait à travers le corps d’Ernest. A minuit et quart, cinq docteurs en
tenue confirmèrent la mort, l’un après l’autre. Mais je savais que le vrai
Ernest Gaither était encore vivant et que son corps seulement était mort. En
quittant la prison, je pensais au verset qu’il aimait tant: "Car Christ
est ma vie, et la mort m’est un gain." |
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Tiré de : www.voxdei.org |